Ça faisait partie de mes cauchemars. Surtout depuis qu’une copine du Conseil régional avait été sauvée in extrémis du désastre par le chauffeur venant la chercher chez elle. Eh bien il a fallu que ça m’arrive ce matin : je n’arrive à comprendre ni pourquoi ni comment mais quand j’ai lu l’alerte sur l’écran de mon téléphone me rappelant que je devais représenter le Président du Conseil général aux traditionnelles cérémonies marquant la journée de la déportation, j’étais à 100 km de Nantes et elles étaient terminées depuis une bonne heure, non déduit le temps où on a du espérer mon arrivée. La honte…
La journée de la déportation en plus… Si il y en a une qui revêt à mes yeux une importance particulière, parmi les cérémonies auxquelles je participe, c’est bien celle-là : on y commémore pas une victoire ou une défaite militaire, on s’y souvient de ces hommes, femmes et enfants embarqués dans des wagons à bestiaux pour un des plus épouvantables crimes que des hommes aient pu concevoir. Si la Shoah garde une absolue singularité parmi la terrifiante litanie des crimes contre l’humanité commis avant et depuis, c’est parce qu’elle est –selon la formule que j’ai entendue dans la bouche de Bernard Guetta – « irréductible à toute les passions humaines ». Exterminés par dizaines de milliers, les juifs sont les premières victimes de la déportation nazie. Mais ce sont bien toutes les victimes qui sont honorées lors de ces journées. La communauté gay dépose également une gerbe après les cérémonies officielles au cimetière en attendant de pouvoir peut-être le faire un jour dans ce cadre.
Alors, s’il m’est arrivé de zapper un rendez-vous ou une réunion (rarement, en plus…), le fait d’avoir posé un lapin aux autorités civiles et militaires, aux associations de familles de déportées et d’anciens combattants rassemblées pour l’occasion et de devoir espérer qu’ils ont déposé pour moi la gerbe du Conseil général me désole sincèrement.
« Ça peut arriver à tout le monde » ai-je entendu en guise de consolation. Certes, mais ça ne doit pas arriver. Alors oui, ça ne risque pas d’arriver à ceux qui sont bien contents que j’accepte ces représentation plus souvent qu’à mon tour (cf. un ancien billet de ce blog…) ce qui leur évite de courir le risque de ma mésaventure de ce matin ; d’accord, c’est le signe que j’ai décidément besoin de vacances mais rien de tout cela ne peut constituer une excuse valable.
Il ne me reste donc qu’à exprimer mes plus profonds regrets et à présenter mes plus humbles excuses, à Philippe Grosvalet d’abord, puisque c’est lui que je devais représenter, au Préfet ensuite ainsi qu’aux autorités militaires, à mes collègues élus présents et surtout aux déportés rescapés des camps, aux familles de celles et ceux qui n’en sont pas revenus et à toutes les personnes qui ont pu être choquées de cette absence.