Pascal Bolo 1er adjoint au Maire de Nantes et quelques autres missions…

8 mai 2017

Et maintenant, que faire (ou ne pas faire) ? (I)

19+6 = 25 ?

J’ai une admiration profonde pour Philippe Torreton. Surtout depuis le souvenir d’un meeting à Nantes en 2005 lors de la campagne pour le OUI au référendum sur le Traité Constitutionnel Européen. Quelle présence, quel talent, quel discours ! J’ai retrouvé ce talent dans le texte qu’il a publié dans L’Obs dans l’entre deux tours et qui converge avec des commentaires ou regrets que j’entends depuis le 23 avril : s’il y avait eu accord entre Hamon et Mélenchon, la gauche aurait été au deuxième tour. Cela rejoint l’encouragement qui nous était fait à soutenir Hamon lors de la primaire de la BAP, au motif qu’il serait le mieux armé pour obtenir une candidature unique de la gauche et des écolos. On sait ce qu’il en advint… Et voilà que des collègues, pour qui j’éprouve respect et amitié pour la plupart, nous lance un appel local allant dans le même sens pour les législatives dans le département.

Ce qui me surprenait dans le texte de Torreton, c’est qu’il donnait lui-même à voir, dans sa critique des atermoiements de la « France Insoumise » et de Mélenchon pour appeler (à tout le moins) à faire barrage à l’extrême-droite, une raison essentielle pour laquelle additionner les voix d’Hamon et de Mélenchon et en déduire une probable présence au second tour, était une vue de l’esprit, un fantasme politique ou un mirage électoral au mieux, une tromperie au pire.

Dessin de X. Gorce 8-05-2017 www.lemonde.fr

Mélenchon et une partie de ses troupes militantes haïssent la gauche de gouvernement bien plus sûrement que la droite et l’extrême-droite. Il a suffit d’entendre l’entame d’intervention haineuse de Mélenchon dimanche soir pour s’en convaincre. Ou, avant le second tour, d’écouter sur France Inter un militant mélenchoniste envisager tranquillement de voter blanc ou de s’abstenir, jugeant que la probabilité d’une victoire de Le Pen était suffisamment faible pour qu’il ne s’abaisse pas à participer à sa défaite. Plutôt risquer les fascistes que de voter pour l’abominable social-libéral ! Position à la fois lâche et irresponsable. Espérer un accord avec Mélenchon et plus encore qu’il soit suivi par cette partie radicalisée de son électorat était donc une chimère. A courir derrière, Benoît a perdu sur tous les fronts. C’est le même écueil qui guette à l’évidence la tentative de nos camarades locaux, si elle prospérait. Cette stratégie erronée a pris une gifle, pourquoi tendre l’autre joue ? L’impossibilité dans laquelle ils se trouvent de faire renoncer les candidats aux législatives de la « France Insoumise », ajoutée à la dynamique évidente dont vont bénéficier les candidats désormais estampillés « La République en marche » condamne leur tentative à l’échec.

Benoît a semblé le découvrir en cours de campagne, la question européenne, reste un autre obstacle incontournable à un tel accord politique. On ne va pas maintenant passer des accords sur des bases que le suffrage universel vient de repousser, l’élu aux deux-tiers s’étant offert une entrée triomphale au Louvre sur fond d’Ode à la joie ! Il aurait mieux valu écouter Philippe Torreton en 2005 et voter OUI, pour éviter de constater 12 ans plus tard que les compagnons de fausse route d’alors creusent consciencieusement notre tombe !

Dessin de FRAP 8-05-2017
http://frap-dessins.blogspot.fr

Il faut choisir. Si on considère qu’aucun des problèmes fondamentaux auxquels nous sommes confrontés dans le réel de la mondialisation ne pourra trouver solution au niveau national et que donc, comme Benoit Hamon l’a bien dit, il n’y a pas d’avenir hors du projet européen, on assume qu’il se développe de compromis en compromis, avec le couple franco-allemand comme moteur et avec les gouvernants dont se dotent les pays membres. On assume aussi qu’il n’y a pas de politique économique et financière s’affranchissant de la règle commune à laquelle on a librement consenti. Il n’y a pas plus de plan B aujourd’hui qu’en 2005 ou qu’en 2012-2013 quand Hollande a eu raison de ne pas aller à un clash dont les grecs auraient été les premières victimes, comme s’ils n’en bavaient pas assez ! Apparemment, même Varoufakis en est d’accord ! Imaginer qu’on puisse trouver un accord avec la « France Insoumise » sur ce point, où elle est cohérente et constante, même si c’est dans l’erreur et l’impasse, c’était illusoire et cela reste dangereux. Comment Philippe Torreton a-t-il pu l’envisager ? Comment des camarades ne voient-ils pas que leurs bonnes intentions sont les pavés d’un enfer ? Benoît Hamon nous a mené sous les 10 %, on veut vraiment faire pire ?

Alors non. 19+6, ça ne faisait pas 25 en avril. Pas plus que les 8+17 des sondages de février !

La gauche au deuxième tour, c’était d’abord résister au dégagisme et assumer le quinquennat sans stigmatiser personne comme Valls a eu le grand tort de le faire ! C’était se mettre en capacité de renvoyer Macron à son statut initial de probable bulle, au lieu de la solidifier en déportant inutilement la campagne vers la gauche de l’isolement. Aussi sûrement que sa campagne a nourri le vote Mélenchon, la stratégie Hamon, comme celle de Valls (bien avant sa défaite puis son reniement de l’engagement de la primaire) auront contribué à renforcer l’audacieux Macron, à légitimer son refus initial de se soumettre à la primaire et à lui faire gagner son pari pourtant insensé. Il n’est aujourd’hui plus temps de se plaindre. Mais il vaudrait mieux éviter de refaire les mêmes erreurs…

(à suivre)

 

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