La situation du FCN ne me laisse pas indifférent. J’ai eu la chance d’être un observateur privilégié des relations parfois compliquées entre la Ville de Nantes et son club phare. Et un acteur occasionnel. Je suis toujours fort assidu à la Beaujoire, un peu moins la dernière saison. Tout ça fait que j’en ai entendu et j’en entends des vertes et des pas mûres ! Il y a les légendes qui ont la vie dure sur le rôle de la ville dans la première vente du club à la SOCPRESSE ; la vie des Saints qui nous est racontée sur le long fleuve tranquille qu’est supposée avoir été la maison jaune avant le péché originel commis par J.L Gripond, le limogeage de Raynald Denoueix ; la sincérité de ceux qui sont tellement attachés à ce club et à l’imaginaire qu’il véhicule encore qu’ils en oublient deux ou trois réalités incontournables ; la tentation de se tourner vers un passé révolu pour (re)construire un avenir. Naturellement, tout cela n’engage que moi ! Quatrième épisode !
« Que celui qui à envie d’une situation à la Strasbourgeoise lève le doigt… »
Quand j’ai conclu la troisième partie de cette série par cette invitation, je ne savais pas que le Racing était menacé non seulement du National mais du CFA. Ce scénario, c’était, à la fin de la saison dernière, celui dont personne ne parlait de peur qu’il se produise. Très simple : la relégation sportive, un dépôt de bilan et le mauvais tour était joué !
On le sait, le FCN est une Société Anonyme qui perd de l’argent chaque mois qui passe. Si on estime entre 60 et 65 M€ ce qu’à couté le FCN à son propriétaire depuis qu’il l’a racheté, c’est notamment parce qu’il a du injecter environ 1 Million de trésorerie chaque mois pour couvrir les pertes. S’il arrêtait…
On l’a dit W.KITA a payé (cher) à Dassault un club malade, mais bien parti dans sa quête de remontée en Ligue 1, doté en urgence par le tandem Gravelaine-Dayan d’un effectif ad hoc, mais n’offrant aucune garantie pour un avenir à l’échelon supérieur. Il a donc récupéré une situation sur laquelle il ne pouvait pas intervenir si aisément que cela : les contrats, notamment de joueurs sont béton et ni ces jeunes gens, ni leur entourage ne pratiquent la philanthropie à l’égard de leurs employeurs. Il ne pouvait donc qu’alourdir la barque dans un premier temps en prenant des risques genre Klasnic ou Gravgaard, puis devant l’échec (quelle que soit l’analyse qu’on en fait), risquer de s’enfoncer un peu plus en ajoutant encore des joueurs à un effectif déjà pléthorique, devenu ingérable par des entraineurs valsant comme à Vienne. Résultat : empilement de joueurs réputés moyens, surpayés, et donc invendables. Bref, un cercle vicieux genre machine infernale.
Alors, quelle solution ? Cela fait bientôt 20 ans qu’on recherche une solution locale : un entrepreneur ou groupe d’entrepreneur régionaux suffisamment fortunés pour risquer leurs sous personnels. Problème : ceux qui en rêvent sont un peu juste côté cagnotte et ceux qui ont la cagnotte n’en rêvent pas. Daniel LE COËNT, patron de WIRQUIN, a bien failli correspondre au profil idéal mais il est apparemment trop raisonnable. Outre une tire-lire un peu juste, les performances de Daniel AUGEREAU en basket sont dans toutes les mémoires pas trop courtes, sans même parler de sa tentation permanente (ou de celle de ceux qui se cachent derrière) de mélanger politique locale et sport professionnel… S’agissant d’un groupement, tout le monde s’accorde à dire qu’un actionnariat dispersé est la meilleure manière de se planter. Il faut un actionnaire de référence, majoritaire, et qui peut donc fixer un cap, le tenir et le faire respecter par tous. S’il y a plusieurs patrons ou plusieurs stratégies dans la même boîte, ça ne peut pas marcher.
Il y a la cohorte de ceux qui savent comment il faut faire, issus, proches ou éloignés du sérail nantais, qui ont l’accord de tel ou tel grand ancien, qui s’affirment capables de faire revenir Denoueix, qui dessinent des organigrammes sur papier, des équipes sur le tableau et qui n’ont pas malheureusement pas un kopeck à aligner sur la table. Ils font le siège de la mairie pour obtenir un soutien, un rendez-vous, dont il pourront se prévaloir la prochaine fois qu’un intermédiaire sûrement bien intentionné leur donnera les coordonnées permettant d ‘avoir accès à tel ou tel magnat du pétrole, industriel asiatique, fond de pension ou de capital-risque anglo-saxon, ou nouveau riche russe potentiellement intéressé par un investissement dans le foot. C’est le rêve d’un mécène qui vous donne les clés et signe les chèques. Le problème, c’est qu’à Grenoble ou Strasbourg, les actionnaires improbables qui n’ont strictement aucune attache avec le club, son histoire, sa ville et ses valeurs, on voit ce que ça donne. Et puis, les mécènes et l’aléas sportif, ça ne fait pas forcément longtemps bon ménage. Imaginez que vous recrutiez en toute bonne foi un Viveros ou Olarticoechea, pour ne parler que des arrières gauche, un Jakovljevic ou un Mazzoni pour ne parler que des avant-centres, un Kosecki ou un Gadocha pour ne parler que des ailiers, vous arrivez vite à des résultats sportifs (et financiers) qui ne seront pas ceux que vous avez promis à votre mécène, en attendant que votre centre de formation soit à nouveau capable de vous sortir une génération 95. On ne tombe pas tous les jours sur Bargas, Fabbri ou Yepes, pour ne parler que des arrières centraux. Quant aux Jorge Burruchaga et Enzo Trossero (le meilleur joueur étranger jamais passé par Nantes ?) d’aujourd’hui, qui peut se les payer en France, à part Lyon ? Et, que je sache, chez ce JMA là, il n’y a qu’un patron qui a mis beaucoup de sous, qui a façonné un club à sa guise, qui a été patient…et qui a réussi.
Bordeaux, dans un autre genre (M6 et Triaud, c’est un peu ce qu’aurait pu être SOCPRESSE et Gripond si ça avait duré et marché) est aussi une référence intéressante, peut-être un modèle de gestion du foot moderne. En France. C’est à dire, pour résumer, là où il y a une DNCG qui empêche de faire n’importe quoi (endettement…) et un marché de droits TV, de places au stade et de produits dérivés qui permet tout juste d’équilibrer ses comptes dans la durée !
Alors, « Casse-toi Kita ! », non seulement ce n’est pas gentil pour lui, mais ça ne peut pas suffire à offrir une perspective. Les politiques du pire amènent toujours le pire et jamais rien d’autre. Le sabordage, même collectif, ce n’est pas du jeu « à la Nantaise ». (à suivre)